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Case report

Tumeur stromale du diverticule de Meckel compliquée d'intussusception chez l´adulte: à propos d'un cas

Tumeur stromale du diverticule de Meckel compliquée d'intussusception chez l'adulte: à propos d'un cas

Stromal tumor arising from Meckel´s diverticulum complicated by intussusception in adults: a case study

Prince Muteba Katambwa1,&, Florent Tshibwid Zeng1, Tresor Kibangula Kasanga1, Dimitri Kanyanda Nafatalewa1, Christelle Ngoie Ngoie1, Ipani Lire1, Erick Wakunga Unem1, Vincent de Paul Kaoma Cabala1, Delphin Kabwit1, Didier Tshibangu Mujinga1

 

1Département de Chirurgie, Cliniques Universitaires de Lubumbashi, Université de Lubumbashi, Province du Haut-Katanga, République Démocratique du Congo

 

 

&Auteur correspondant
Prince Muteba Katambwa, Département de Chirurgie, Cliniques Universitaires de Lubumbashi, Université de Lubumbashi, Province du Haut-Katanga, République Démocratique du Congo

 

 

Résumé

Anomalie congénitale la plus commune (0,3 à 4% de la population), le diverticule de Meckel (DM) est le plus souvent révélé par ses complications, dont l´intussusception et le développement des tumeurs stromales gastro-intestinales (TSGI) ou GIST (gastrointestinal stromal tumor). Ces complications sont rares chez l'adulte. Nous rapportons l´observation d´une femme de 44 ans chez qui un diverticule de Meckel révélé par une invagination intestinale aigüe, a montré à l´examen anatomopathologique (sans immunohistochimie réalisée) une TSGI.


English abstract

The most common congenital anomaly (0.3-4% of the population), Meckel´s diverticulum (MD), usually manifests by its complications, including intussusception and the development of gastrointestinal stromal tumor (GIST). These complications are rare in adults. We report the case of a 44-year old woman in whom Meckel´s diverticulum was revealed by acute intestinal invagination. Anatomopathological examination (without immunohistochemistry) showed GIST.

Key words: Meckel´s diverticulum, invagination, gastrointestinal stromal tumor (GIST), adult

 

 

Introduction    Down

Le diverticule de Meckel (DM) est une anomalie congénitale caractérisée par la présence d'une poche borgne au pôle anti-mésentérique de l´intestin grêle. Sa fréquence dans la population générale étant de 2 à 4%, c'est l'anomalie congénitale la plus fréquente [1]. Souvent asymptomatique, il peut présenter plusieurs complications parmi lesquels on retrouve l´intussusception et plus rarement, le développement des tumeurs [2]. Parmi les tumeurs se développant aux dépens du DM, les tumeurs stromales gastro-intestinales (TSGI) sont les plus fréquentes du tube digestif en terme de tumeurs mésenchymateuses [3]. Tout comme le diverticule de Meckel, la présence d´une tumeur intestinale est un facteur favorisant l´intussusception; l´invagination d´un segment du tube digestif dans un segment qui lui est immédiatement adjacent [4]. C'est une pathologie rare chez l´adulte car elle représente 5% de toutes les intussusceptions et cause 1% des occlusions intestinales [5]. Nous rapportons un cas rare d´un diverticule de Meckel révélé par une invagination intestinale aigüe chez une femme de 44 ans, dont l´examen anatomopathologique (sans immunohistochimie réalisée) a montré une TSGI.

 

 

Patient et observation Up    Down

Il s'agissait d'une patiente âgée de 44 ans transférée d'une structure sanitaire de son quartier pour des douleurs abdominales diffuses, progressives et paroxystiques, des vomissements avec arrêt de gaz depuis deux jours, sans fièvre. A l'examen physique, la patiente avait un état général altéré par l´asthénie physique, sa langue était sèche. Elle avait une polypnée et une tachycardie avec la tension artérielle et la température normales. A son abdomen, elle présentait un ballonnement abdominal plus marqué du côté droit, sans ondes péristaltiques visibles ni masse anormale palpée. Une sensibilité abdominale diffuse et des bruits hydro-aériques bien perçus en périombilical étaient notés. Le toucher rectal était normal. La radiographie de l´abdomen sans préparation avait montré la prédominance de niveaux hydro-aériques du grêle. Ce tableau de syndrome occlusif avait indiqué une laparotomie exploratrice en urgence, après réanimation de la patiente.

 

Le constat per opératoire avait révélé la présence d´un boudin d´invagination iléo-iléale qui après désinvagination avait mis en évidence un diverticule de Meckel sous forme d´une masse ovoïde, œdématiée d´environ 1,5 centimètres de long située sur l´iléon à environ 30 centimètres de la valvule de BAUHIN sur la face anti mésentérique (Figure 1). Une résection intestinale emportant la masse (Figure 2), suivi d´une anastomose iléo-iléale termino-terminale avaient été réalisées. L´examen anatomopathologique du diverticule avait révélé une tumeur stromale gastro-intestinale. Les suites post opératoires étaient simples et la patiente avait quitté l´hôpital deux semaines après l´intervention. Une année après, la patiente n´accuse pas de plaintes.

 

 

Discussion Up    Down

Le diverticule de Meckel découle de l´oblitération incomplète de la partie proximale du canal vitellin (ou canal omphalo-mésentérique) autour de la cinquième semaine du développement embryonnaire [1]. Son incidence est variable, entre 0,3 et 3% et dépend de l´origine des études: radiologiques, chirurgicales ou autopsies. Il existe une légère prédominance masculine: sexe ratio de 1,7 à 2,4. Le diagnostic du DM est très souvent difficile puisque sur des grandes séries, seulement 6% des DM sont diagnostiqués avant l´intervention [6].

 

Dans 84% des cas, le DM est asymptomatique et le diagnostic est alors posé fortuitement lors des radiographies, des endoscopies ou au cours des interventions chirurgicales [1]. Chez l´adulte, le DM est souvent découvert lors d´une intervention chirurgicale indépendante de celui-ci: appendicectomie et hernie notamment. Des complications néanmoins peuvent le révéler dans 19% des cas; ce sont des occlusions (34 à 53% des complications), des diverticulites (13 à 31%), des hémorragies digestives (12 à 25%) [7]. Les autres complications incluent la perforation, les tumeurs, l´ulcération chronique, la fistule vésico-entérale, la hernie, la torsion axiale, l´entérolithe et le retournement en doigt de gant [8]. Chez notre patiente, l´occlusion intestinale par invagination avait relevé le DM et sur ce dernier, une tumeur stromale était découverte. Soixante-quatorze pourcent (74%) des DM réséqués sont anormaux et 46 à 60% contiennent du tissu ectopique dont les plus fréquents sont la muqueuse gastrique, les acini pancréatiques, les glandes de Brunner, les îlots pancréatiques, la muqueuse colique, l´endomètre et les tissus hépatobiliaires [1].

 

Pour ce qui concerne les investigations complémentaires, la radiographie abdominale sans préparation présente deux intérêts essentiels dans le DM: identifier les entérolithes et mettre en évidence une occlusion mécanique du grêle. La scintigraphie au pertechnetate de technétium 99 (99 Tc) a une sensibilité de 85% et une spécificité de 95% chez l´enfant et seulement 63% chez l´adulte. L´artériographie coelio-mésenterique a été fréquemment réalisée en raison de la symptomatologie hémorragique souvent aigue. Le transit du grêle exige deux conditions techniques essentielles pour permettre une détection du DM: un bon remplissage des anses grêles par une grande quantité de produit de contraste avec colonne continue duodeno caecale et une dissociation de chaque anse intestinale sous contrôle télévisé [9].

 

En dehors des complications, l´échographie identifie difficilement un DM sous forme d´une structure digestive borgne en cible péri-ombilicale. Le DM non compliqué apparait comme une anse iléale normale; la tomodensitométrie l´identifie rarement. En cas de complications infectieuses, obstructives ou tumorales, l´identification est facile. Il est rare qu´un examen d´Imagerie par résonance magnétique (IRM) soit réalisé [9]. La radiographie abdominale sans préparation, seul examen d´imagerie réalisé chez notre patiente était motivée par le syndrome occlusif (Figure 3).

 

Décrit pour la première fois par Gary en 1953, le DM invaginé se bombe dans la lumière intestinale puis constitue une invagination ileo-ileale, réalisant ainsi une masse endoluminale [10]. La présentation clinique de l´invagination du DM est subaiguë, voir chronique. L´invagination peut s´étendre jusqu´au rectum. Un DM de plus de 2cm de long et contenant du tissu pancréatique favoriserait une invagination. Chez l´enfant, l´apparition d´une adenolymphite mésentérique peut également favoriser une invagination souvent iléo-colique qui résistera à la désinvagination par insufflation ou lavement opaque. Dans notre cas, le DM avait moins de 2 centimètres de long. L´invagination dans ce cas pourrait partiellement s´expliquer par le fait que le DM était en lui-même retourné en doigt de gant vers la lumière iléale. Au transit du grêle, on met en évidence une formation oblongue endoluminale parallèle à l´axe du grêle au sein d´une anse digestive dilatée. A l´échographie, l´image d´invagination est souvent caractéristique. Le centre de l´anse invaginée apparait très échogène. En tomodensitométrie, l´anse dilatée est bien visible avec un contenu graisseux au centre; simulant un lipome [9].

 

Le DM à 70 fois plus de chance de développer une tumeur par rapport au reste de l´iléon [11], son incidence y est de 0,5 à 1,9% et sa fréquence atteint 3%. En raison de son hétérotopie muqueuse, le DM peut donner naissance à des nombreux types tumoraux. Les tumeurs bénignes (lipome, hamartomes neuromusculaire et vasculaire) sont peu fréquentes; les tumeurs malignes primaires sont représentées par des tumeurs neuroendocriniennes, des adénocarcinomes, des TSGI, les sarcomes et les lymphomes [2,12]. Les métastases représentent 15,8% des tumeurs malignes [12]. Les tumeurs obstructives au niveau du DM sont relativement rares, ne représentant que 1% des complications du DM [13].

 

Les tumeurs stromales gastro-intestinales (TSGI, tumeurs mésenchymateuses spécifiques du tractus gastro-intestinal, dérivées des cellules de Cajal ou d´un de leur précurseur) se développent dans la majorité des cas dans l´estomac (50 à 70% des cas) et le grêle (20 à 30% des cas), plus rarement le rectum, le côlon, l'œsophage ou le mésentère. Leur incidence est estimée à environ 15 cas/million d'habitants/an, l'âge médian au diagnostic est d'environ 60 ans et le sex-ratio est d´environ 1/1. Elles sont typiquement de phénotype CD117/KIT+ (95%) et DOG-1+ (95%). Elles présentent très fréquemment des mutations activatrices des gènes codant pour les récepteurs tyrosine-kinase KIT ou PDGFRA (Platelet-derived growth factor receptor alpha ou récepteur alpha du facteur de croissance dérivé des plaquettes). Initialement considérées comme une entité homogène sur le plan nosologique, les TSGI constituent en fait un ensemble hétérogène sur le plan de la biologie moléculaire, du comportement clinique et de la réponse au traitement. Les TSGI sont généralement sporadiques ce qui n'impose pas de consultation d'oncogénétique en dehors des rares cas associés à des syndromes familiaux [14].

 

Dans la littérature anglosaxonne, seuls de rares cas de TSGI exprimant la protéine c-kit développée à partir d´un DM ont été publiés. Ainsi, Scoazec et al. en effectuant une relecture des documents histologiques et la recherche d´un immunomarquage de la protéine c-kit, ont permis d´identifier et de reclasser comme TSGI environ 50% des tumeurs initialement classées dans d´autres catégories; respectivement 56% et 61% des tumeurs classées comme léiomyomes et léiomyosarcomes ayant été reclassées comme TSGI [15]. Par manque de moyen financier et technique dans notre milieu, l´immunohistochimie n´était pas réalisée sur notre prélèvement cependant, une relecture des pièces reste possible. Le traitement du DM reste controversé. Comme la fréquence de l´apparition des symptômes d´un DM à l´âge adulte est de 2%, certains auteurs préconisent de ne pas réséquer les DM asymptomatiques chez les enfants. Mais compte tenu du risque de malignité élevé au niveau du DM, d´autres auteurs recommandent formellement la résection.

 

 

Conclusion Up    Down

Malformation congénitale la plus fréquente du tube digestif et rare surtout chez l´adulte, le DM pose un problème diagnostique et thérapeutique. Il est le plus souvent de diagnostic peropératoire, parfois révélé par des complications dont l´invagination intestinale et les tumeurs (TSGI) que nous avons rapporté. Dans ces cas, un geste chirurgical urgent est indiqué car les manœuvres rétrogrades sont inefficaces et les complications délétères sont inévitables en cas de malignité.

 

 

Conflits d'intérêts Up    Down

Les auteurs ne déclarent aucun conflits d'intérêts.

 

 

Contributions des auteurs Up    Down

Tous les auteurs ont participé à ce travail. Tous ont lu et approuvé la version finale du manuscrit.

 

 

Figures Up    Down

Figure 1: boudin d'invagination intestinale

Figure 2: résection intestinale ayant emporté le diverticule de Meckel

Figure 3: images de niveaux hydro-aériques sur le cliché de radiographie abdominale sans préparation

 

 

Références Up    Down

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