Cancer du sein chez la femme de 35 ans et moins au CHU de Brazzaville
Eliane Ndounga, Augustin Tozoula Bambara, Alexis Fortuné Bolenga Liboko, Clautaire Itoua, Donatien Moukassa, Jean Bernard Nkoua Mbon
Corresponding author: Eliane Ndounga, Service d´Oncologie Médicale, CHU de Brazzaville, République du Congo
Received: 12 Nov 2019 - Accepted: 26 Feb 2020 - Published: 10 Mar 2020
Domain: Oncology
Keywords: Cancer, sein, femme jeune
©Eliane Ndounga et al. PAMJ Clinical Medicine (ISSN: 2707-2797). This is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution International 4.0 License (https://creativecommons.org/licenses/by/4.0/), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, provided the original work is properly cited.
Cite this article: Eliane Ndounga et al. Cancer du sein chez la femme de 35 ans et moins au CHU de Brazzaville. PAMJ Clinical Medicine. 2020;2:94. [doi: 10.11604/pamj-cm.2020.2.94.20955]
Available online at: https://www.clinical-medicine.panafrican-med-journal.com//content/article/2/94/full
Cancer du sein chez la femme de 35 ans et moins au CHU de Brazzaville
Breast cancer in woman 35 years and less at CHU of Brazzaville
Eliane Ndounga1,&, Augustin Tozoula Bambara2, Alexis Fortuné Bolenga Liboko1, Clautaire Itoua3, Donatien Moukassa4, Jean Bernard Nkoua Mbon1
1Service d´Oncologie Médicale, CHU de Brazzaville, République du Congo, 2Service de Cancérologie, CHU Yalgado Ouédraogo, Ouagadougou, Burkina Faso, 3Service de Gynécologie Obstétrique, CHU de Brazzaville, République du Congo, 4Service d´Anatomie Cyto-Pathologique, Hôpital ELBO, OYO, République du Congo
&Auteur correspondant
Eliane Ndounga, Service d´Oncologie Médicale, CHU de Brazzaville, République du Congo
Introduction: l'objectif de cette étude est de dégager les aspects épidémiologiques, cliniques, histologiques et thérapeutiques des cancers du sein au CHU de Brazzaville, à travers une étude comparative d´une série de 33 patientes âgées de 35 ans ou moins et un second groupe de 32 patientes non ménopausées, âgées de plus de 35 ans.
Méthodes: étude rétrospective ayant analysée les cas de cancer du sein chez les patientes suivies dans le service d´Oncologie médicale du CHU de Brazzaville entre le 1er Janvier 2012 et le 31 Décembre 2017. Ont été retenus, les patientes âgées de 35 ans et moins au moment du diagnostic, présentant un cancer du sein histologiquement prouvé et ayant bénéficié d´une analyse immunohistochimique.
Résultats: la moyenne d´âge chez les patientes de 35 ans et moins était de 30,6 ans. Les antécédents familiaux de cancer ont été retrouvés dans 12,1% des cas. La taille tumorale moyenne était de 8,36cm. Sur le plan anatomo-pathologique, le carcinome infiltrant de type non spécifique était le plus fréquent (60,6%) avec une prédominance du grade II SBR (65,6%). Le profil luminal A était prédominant (39,4%) à l´immunohistochimie. La médiane de survie globale était de 26 mois.
Conclusion: les résultats de notre étude confirment la rareté du cancer du sein chez les femmes de 35 ans et moins.
Introduction: to identify the epidemiological, clinical, histological and therapeutic aspects of breast cancer at the Brazzaville University Hospital, through a comparative study of a series of 33 patients aged 35 years or less and a second group of 32 premenopausal patients, over 35 years of age. Methods: retrospective study that analyzed cases of breast cancer among patients followed in the Medical Oncology Department of the Brazzaville University Hospital between January 1st, 2012 and December 31st, 2017. The patients aged 35 and under at the time of diagnosis, with histologically proven breast cancer and immunohistochemical analysis. Results: the mean age for patients 35 years old and younger was 30.6 years. Family history of cancer was found in 12.1% of cases. The average tumor size was 8.36cm. Pathologically, non-specific infiltrating carcinoma was the most common (60.6%) with a predominance of SBR grade II (65.6%). Luminal profile A was predominant (39.4%) in immunohistochemistry. The median overall survival was 26 months. Conclusion: the results of our study confirm the rarity of breast cancer in women 35 years old and less.
Key words: Cancer, breast, young woman
Malgré une incidence croissante à travers le monde, le cancer du sein reste essentiellement une maladie de la femme ménopausée; il touche rarement la femme entre 30 et 40 ans [1]. Chez la femme jeune, ce cancer représente un problème particulier compte tenu des enjeux médicaux et affectifs majeurs que ce diagnostic engendre [2]. La définition même de ce cancer du sein de la femme jeune n´est pas univoque. Selon les études, une femme « jeune » correspond à une femme de moins de 35 ans, de moins de 40 ans voire simplement préménopausée [2]. Nous allons, dans cette étude, nous focaliser sur la femme âgée de 35 ans et moins. Le cancer du sein est le premier cancer de la femme en Afrique au Sud du Sahara. Au Congo, il est le 1er cancer de la femme, comme dans de nombreux pays africains [3-6], avec près de 600 nouveaux cas par an à Brazzaville [3]. L´âge moyen de diagnostic de ce cancer est de 48,7 ans [4]. Chez la femme âgée de 35 ans et moins, aucune étude rapportant les caractéristiques du cancer du sein n´a été publiée dans notre pays. Le but de ce travail était de décrire les aspects épidémiologiques, cliniques, histologiques et thérapeutiques à travers une étude comparative d´une série de 33 patientes âgées de 35 ans ou moins et un second groupe de 32 patientes non ménopausées, âgées de plus de 35 ans.
Il s´est agi d´une étude rétrospective ayant analysée les cas de cancer du sein chez les patientes suivies dans le service d´Oncologie médicale du CHU de Brazzaville entre le 1er Janvier 2012 et le 31 Décembre 2017. Ont été retenus, les dossiers des patientes âgées de 35 ans et moins au moment du diagnostic, présentant un cancer du sein histologiquement prouvé et ayant bénéficié d´une analyse immunohistochimique. Ce premier groupe a été comparé à un groupe qui avait inclus les patientes âgées de plus de 35 ans, non ménopausées, pris en charge durant la même période et pour lesquelles, les mêmes données ont été recueillies. Les informations concernant les données épidémiologiques, cliniques et anatomo-pathologiques ont été recueillies à partir des dossiers médicaux des patientes. Chaque dossier sélectionné comportait des informations sur l´examen clinique, le bilan morphologique fait d´une échographie mammaire, d´une mammographie, d´une radiographie du thorax, d´une échographie abdominale et d´une échographie cardiaque pour le bilan préthérapeutique. Ces informations ont permis de classifier les patientes selon le code TNM puis en stade AJCC. Les informations histologiques ont été obtenues sur pièce biopsie au trucut et sur pièce de mastectomie.
Le compte-rendu histologique devait préciser le type histologique, le grade histo-pronostique de Sarff Bloom Richardson (SBR), l´expression des récepteurs hormonaux (RH) et de l´oncoproteine HER-2/neu. Les stratégies thérapeutiques proposées se présentaient comme suit: pour les patientes non métastatiques au moment du diagnostic: lorsque la taille tumorale était inférieure ou égale à 3cm, une chirurgie conservatrice première a été proposée. L´indication ou non de la chimiothérapie et/ou de la radiothérapie chez ces patientes était fonction des résultats histologiques de la pièce opératoire; l´examen extemporané ne pouvant être réalisé; lorsque la taille tumorale était supérieure ou égale à 3cm, une chimiothérapie néo-adjuvante était proposée type FAC60 à raison de 3 cures (Fluorouracile 600mg/m2 à J1, Doxorubicine 60mg/m2 à J1, Cyclophosphamide 600mg/m2 à J1) tous les 21 jours. La chirurgie proposée pour ce groupe était radicale (mastectomie avec curage axillaire) en cas de rémission partielle à l´évaluation après les 3 cures de FAC60. En adjuvant, la chimiothérapie proposée était à base de Taxanes (Docétaxel 100mg/m2 à J1 tous les 21 jours). La radiothérapie externe sur la paroi thoracique et les aires ganglionnaires a été proposée à toutes ces patientes; l´hormonothérapie fait de Tamoxifène 20mg/j pendant une durée de 5 ans et le Trastuzumab à la dose de 8 mg/m2 en dose de charge et 6 mg/m2 en dose d´entretien, en association avec le Docétaxel et pendant une durée de 12 mois ont été proposés chez les patientes exprimant les récepteurs hormonaux et /ou l´oncoprotéine HER2.
Cette partie mérite d´être clarifiée. Les patientes métastatiques au moment du diagnostic ont été traitées par chimiothérapie associée ou non à l´hormonothérapie et/ou au Trastuzumab lorsque l´indication se posait. Les paramètres suivants ont été étudiées: les caractéristiques épidémiologiques et cliniques, l´extension tumorale, les caractéristiques histologiques, thérapeutiques ainsi que la survie des patientes. L´extension tumorale a été évaluée selon le code TNM puis regroupée en stadee AJCC (American Joint Committee on Cancer). Les variables qualitatives ont été décrites dans chaque groupe par des proportions. Les comparaisons entre les deux groupes ont été faites par des tests de chi2 ou le test exact de Fisher. Les variables quantitatives ont été décrites par des moyennes. Les moyennes d´âge des deux groupes de patients ont été comparées par le test t de student. La survie a été calculée par la méthode de Kaplan Meier en prenant comme temps de participation le temps compris entre la date du diagnostic et la date des dernières nouvelles. Les dernières nouvelles ont été recueillies dans les dossiers médicaux pour les patients décédés en milieu hospitalier, et par téléphone auprès des autres patients ou de leurs proches. Les données de survie ont été comparées par le test de Logrank. Un seuil de significativité de 0,05 a été retenu pour toutes ces analyses.
Caractéristiques épidémiologiques: nous avons colligé 65 dossiers répondant aux critères d´inclusion. Le premier groupe (groupe 1) était constitué de 33 patients et le second groupe (groupe 2) de 32. Il s´agissait dans tous les cas de patients de sexe féminin. La moyenne d´âge chez les patientes de 35 ans et moins était de 30,6 ans contre 44,8 mois pour les plus de 35 ans. Pour les patientes du groupe 1, la tranche d´âge la plus touchée était celle comprise entre 31 et 35 ans. En ce qui concerne les facteurs de risque, la ménarche était précoce chez 24,2% des patientes dans le 1er groupe contre 16,1% dans le second groupe. Aucune patiente âgée de plus de 35 ans n´était nulligeste tandis que 15,1% l´était chez les 35 ans et moins. Les antécédents familiaux de cancer ont été retrouvés respectivement dans 12,1% (groupe 1) et 12,5% (groupe 2).
Aspects cliniques: le délai de consultation était de 9 mois pour le groupe 1 et de 6 mois pour le second groupe ; cette différence était significative (p=0,01). La symptomatologie ne différait pas significativement entre les deux groupe (p=0,13). En effet, pour les deux groupes, le motif de consultation était dominé par la constatation d´un nodule dans l´un des seins: 97% chez les patientes de 35 ans et moins et 87,5% chez les plus de 35 ans. La taille tumorale moyenne était de 8,36cm pour le groupe 1 et de 7,12cm pour le groupe 2 (Tableau 1).
Histologie: dans les deux groupes, le carcinome infiltrant de type non spécifique était le type histologique le plus retrouvé: 60,6% pour les patientes de 35 ans et moins et 71,9% pour les plus de 35 ans. Il s´agissait de tumeurs agressives dans les deux groupes avec une prédominance des grades II SBR sans différence statistiquement significative (p=0,07). La répartition selon le stade AJCC au diagnostic ne différait pas de façon significative entre les deux groupes (p= 0,15). Sur le plan moléculaire, l´on notait une prédominance du type luminal A dans les deux groupes, respectivement de 39,4% et 50% (Tableau 1).
Traitement et survie: chez les patientes âgées de 35 ans et moins, la chimiothérapie néoadjuvante a été réalisée dans 22 (66,7%) cas. Dix-huit patientes (81,8%) ont été opérées dont 2 d´emblée; il s´agissait d´une chirurgie radicale dans tous les cas. En adjuvant, 15 patientes (68,1%) ont bénéficié de la chimiothérapie, 10 ont bénéficié d´une radiothérapie, 10 ont reçu une hormonthérapie et 2 ont bénéficié du Tratuzumab. Chez les plus de 35 ans, 25 patientes (78,1%) ont reçu une chimiothérapie néoadjuvante. Vingt-six patientes (81,2%) ont été opérées dont une d´emblée; une patiente a bénéficié d´une chirurgie conservatrice type quandrantectomie. En adjuvant, 23 patientes ont reçu une chimiothérapie adjuvante, 2 ont bénéficié d´une radiothérapie, 17 ont reçu une hormononothérapie et aucune n´a bénéficié du Trastuzumab. Tous groupes confondus, la médiane de survie globale était de 26 mois (Figure 1). Elle était de 15 mois chez les patientes de 35 ans et moins contre 49 mois chez les patientes âgées de plus 35 ans (Figure 2). Cette différence était significative (p=0,001). Ajustée sur le stade au diagnostic, tous groupes confondus, la médiane de survie n´était pas atteinte pour le stade II, elle était de 26 mois pour le stade III et de 11 mois pour le stade IV (Figure 3). En ce qui concerne le profil moléculaire, la médiane de survie était de 2 mois pour le profil HER2, 29 mois pour le type luminal A, 9 mois pour le type luminal B et 25 mois pour le profil triple négatif et ce tous groupes confondus (Figure 4), sans différence significative (p=0,08).
Le cancer du sein chez la femme de 35 ans et moins est rare. Dans cette tranche d´âge, il ne représente que 2 à 24% [2-4]. Dans certains pays du Maghreb tel que l´Algérie, la Tunisie et le Maroc, ces taux sont plus élevés, respectivement de 24%, 11% et 22% contre 2 à 4% dans les pays occidentaux [5,6]. Dans notre série, la fréquence de cancer était de 2,9%. L´âge moyen au moment du diagnostic dans notre étude était de 30,6 ans, ce qui concorde avec les résultats de Znati au Maroc [7]. Dans la littérature, la moyenne d´âge varie entre 31 et 32 ans [8,9]. En ce qui concerne les patientes de moins de 30 ans, leur proportion est estimée à 1% dans le monde [10]; dans notre série elles représentaient 33%. En ce qui concerne les facteurs de risque chez la femme jeune, la prédisposition génétique est un facteur important. Trois gènes sont désormais reconnus dans ces formes héréditaires: le TP53 dans le syndrome de Li-Fraumeni et les gènes BRCA1 et BRCA2 [11]. En Afrique sub-saharienne, ces facteurs génétiques n´ont pas encore été réellement explorés; pour les éventuelles mutations sur les gènes BRCA 1 et BRCA2, il n´existe que quelques données fragmentaires [1]. D´autres facteurs liés à la vie génitale ont été retenus, essentiellement la ménarche précoce et la nullipartité [2,7], retrouvées respectivement chez 9 et 5 patientes dans notre étude.
Le délai moyen de consultation de nos patientes était plus long que celui constaté par Bouffetal au Maroc et Knaffir en Tunisie [3,4]. Cette différence peut s´expliquer par l´itinéraire de nos patientes avant la première consultation dans notre service [12]. La constatation d´un nodule dans le sein a été le principal motif de consultation comme décrits par d´autres auteurs [8,9]. Au plan clinique, les caractéristiques du cancer du sein chez la femme jeunes sont différentes des femmes plus âgées: une taille clinique plus importante, un TNM plus défavorable [13]. C´est le cas dans notre série où la taille tumorale moyenne était de 8,5cm. Les tumeurs T4 étaient prédominantes dans notre série. Certains auteurs [3,4,14] ont par contre constaté une prédominance du stade T2. Cette prédominance de ce stade localement avancé chez nos patientes peut s´expliquer par l´absence de politique nationale de dépistage du cancer du sein d´une part, et d´autre part par le bas niveau socio-économique de la population en général; laquelle population consulte souvent à un stade tardif. Une atteinte ganglionnaire clinique a été notée chez 82% de nos patientes. Les formes d´emblée métastatiques dans cette tranche d´âge se voient dans 2,4 à 30% des cas [4]; dans notre série ce taux était de 15%. En ce qui concerne l´anatomie pathologique, la littérature rapporte une prédominance du carcinome infiltrant de type non spécifique [3,15] comme ce fût le cas dans notre étude.
Le grade II était prédominant dans notre série contrairement à ce qui est rapporté par plusieurs études [7,13]; le nombre peu important des patientes opérées dans notre étude ne nous permet pas de tirer des conclusions. Une autre étude avec un effectif plus important est donc nécessaire afin de confirmer ou non cette tendance. Comparativement à la femme âgée, le cancer du sein de la femme jeune est caractérisé par une fréquence accrue des tumeurs surexprimant HER-2, une fréquence peu élevée de l´expression des récepteurs hormonaux et une fréquence élevée des formes « triple négatif » [13]. Dans les études comparatives menées par Colleoni et al. [15] et Khotari et al. [10], les tumeurs n´exprimant pas les récepteurs hormonaux étaient significativement plus élevées dans le groupe des patientes âgées de moins de 35 ans par rapport aux femmes âgées. Une étude menée par Cancello et al. a montré également une plus grande fréquence des formes triples négatifs chez les femmes jeunes comparativement aux femmes âgées [1]. Sur le plan thérapeutique, le traitement du cancer du sein chez la femme jeune suit les mêmes recommandations que chez la femme plus âgée. La prescription de la chimiothérapie néo-adjuvante est plus fréquente chez les femmes jeunes [13]. Bien qu´indiquée chez toutes nos patientes, elle n´a concernée 73% de ces dernières car l´achat des drogues anticancéreux est conditionné par le pouvoir financier des patientes.
Au plan chirurgical, la littérature décrit un taux de récidive locale supérieur a été observé chez la femme jeune après traitement conservateur [3,4,16]. Néanmoins, l´American Society of Clinical Oncology (ASCO) a annoncé au congrès de 2005 que même si l´âge jeune était associé à un risque plus grand de récidive locale après traitement conservateur, cela ne doit pas conduire à exclure la chirurgie conservatrice dans cette population puisqu´aucune étude n´a montré de résultat négatif sur la survie [16]. Dans notre série, les patientes qui ont pu être opérées ont bénéficié d´un traitement radical. Ce choix s´explique par le stade avancé de diagnostic des tumeurs chez nos patientes. Madany et al. ont rapporté que le traitement conservateur du cancer du sein ne concerne que peu de patientes en Afrique sub-saharienne car la majorité des tumeurs sont diagnostiquées à des stades T2-T4 avec une atteinte ganglionnaire clinique associée [1]. La chimiothérapie adjuvante apporte un bénéfice certains chez les femmes jeunes qu´il y ait ou non une atteinte ganglionnaire axillaire [17,18]. Une augmentation significative du risque de décès par cancer chez des femmes de moins de 35 ans qui n´ont pas reçu de chimiothérapie en adjuvant a été rapportée par Kroman et al. [19].
Dans notre série, seules 62,5% ont pu bénéficier de la chimiothérapie adjuvante. En ce qui concerne la radiothérapie, l´effet de l´irradiation locorégionale est démontrée aussi bien en termes de taux de contrôle local qu´en termes de survie globale, avec un bénéfice d´environ 10% à dix ans [2,7]. Les onze patientes qui ont pu bénéficier de ce traitement dans notre étude ont été obligées de se rendre à l´étranger car cette technique de traitement n´est actuellement pas disponible dans notre pays. L´indication d´un traitement par hormonothérapie lorsque les récepteurs hormonaux sont exprimés est établie. L´hormonothérapie de référence chez la femme jeune est le Tamoxifène. L´efficacité du Trastuzumab en situation adjuvante chez les patientes surexprimant HER-2 a été démontrée dans la littérature [7], et ce quel que soit l´âge de la patiente. Dans notre série, l´indication du Trastuzumab se posait chez 2 patientes. Aucune n´a pu bénéficier du traitement du fait du coût élevé du traitement. Le cancer du sein chez la femme jeune est considéré comme de mauvais pronostic par rapport à celui de la femme âgée [20]. Le risque de développer des métastases chez les femmes de moins de 35 ans est de 30% [20]. Nos résultats paraissent faibles (6,7%) et cela peut s´expliquer d´une part par la petite taille de notre échantillon et d´autre part par le nombre de patientes perdues de vue au cours de l´étude. Nous avons noté une mortalité globale de 47%.
Les résultats de notre étude confirment que le cancer du sein chez la femme de 35 ans et moins est rare. Il est caractérisé par un délai de consultation long, expliquant les stades avancés au moment du diagnostic. La nécessité d´une étude plus élargie s´impose afin d´en dégager la prévalence nationale réelle qui permettrait la mise en place d´un programme de dépistage chez ces femmes jeunes dans le but d´améliorer leur prise en charge.
Etat des connaissances actuelles sur le sujet
- Le cancer du sein est le premier cancer de la femme dans le monde;
- Il s´agit d´une pathologie de la femme ménopausée;
- Il touche rarement la femme jeune.
Contribution de notre étude à la connaissance
- Il s´agit de la première étude congolaise portant sur les caractéristiques des cancers du sein chez la femme âgée de 35 ans au plus.
Les auteurs ne déclarent aucun conflit d´intérêts.
Eliane Ndounga: conception et rédaction de l´article; Augustin Tozoula Bambara: analyse et interprétation des données; Alexis Fortuné Bolenga Liboko: révision critique de l´article; Clotaire Itoua: révision critique de l´article; Donatien Moukassa: révision critique de l´article; Jean Bernard Nkoua Mbon: approbation finale de la version à publier. Tous les auteurs ont lu et approuvé la version finale du manuscrit.
Tableau 1: caractéristiques cliniques et histologiques des patientes
Figure 1: Courbe de survie globale tous groupes confondus
Figure 2: courbes de survie globale selon le groupe
Figure 3: courbes de survie selon le stade AJCC tous groupes confondus
Figure 4: courbes de survie selon le statut moléculaire tous groupes confondus
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