Endométriose de la paroi abdominale antérieure : à propos d´un cas et revue de la littérature
Anajjar Mohamed, Yasser El Brahmi, Faisal El Mouhafid, Mohammed Elfahssi, Mbarek Yakka, Abderrahman Elhjouji, Abdelkader Ehirchiou, Aziz Zentar, Abdelmounaim Ait Ali
Corresponding author: Anajjar Mohamed, Service de Chirurgie Viscérale II, Hôpital Militaire Mohammed V, Rabat, Maroc
Received: 24 May 2020 - Accepted: 07 Jun 2020 - Published: 15 Oct 2020
Domain: Gynecology,Obstetrics and gynecology,General surgery
Keywords: Endométriose, tumeur, paroi abdominale
©Anajjar Mohamed et al. PAMJ Clinical Medicine (ISSN: 2707-2797). This is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution International 4.0 License (https://creativecommons.org/licenses/by/4.0/), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, provided the original work is properly cited.
Cite this article: Anajjar Mohamed et al. Endométriose de la paroi abdominale antérieure : à propos d´un cas et revue de la littérature. PAMJ Clinical Medicine. 2020;4:65. [doi: 10.11604/pamj-cm.2020.4.65.23614]
Available online at: https://www.clinical-medicine.panafrican-med-journal.com//content/article/4/65/full
Case report
Endométriose de la paroi abdominale antérieure : à propos d´un cas et revue de la littérature
Endométriose de la paroi abdominale antérieure : à propos d´un cas et revue de la littérature
Anterior abdominal wall endometriosis: case report and literature review
Anajjar Mohamed1,&, Yasser El Brahmi1, Faisal El Mouhafid1, Mohammed Elfahssi1, Mbarek Yakka1, Abderrahman Elhjouji1, Abdelkader Ehirchiou1, Aziz Zentar2, Abdelmounaim Ait Ali1
&Auteur correspondant
Endométriose de la paroi abdominale est une localisation rare, des endométrioses extra-génitales, et qui peut prêter confusion avec des tumeurs malignes. Nous rapportons le cas endométriose cicatricielle post césarienne prise en charge dans notre formation. Afin de mettre en évidence les étapes de diagnostic et thérapeutique. Madame L.M âgée de 32 ans, G2P2 sans antécédents, présente une douleur hypogastrique cyclique paroxystique à recrudescence prémenstruelle sans signes associés, l´examen clinique révèle une masse dure, en regard de l´incision de Pfannenstiel. Le reste de l´examen était sans particularité. L´échographie montre un processus lésionnel intramusculaire et l´Imagerie par résonance magnétique (IRM) objective son, rehaussement de façon synchrone par rapport à l´endomètre utérin mesurant 53,5x38x66mm. La prise en charge est une pariétectomie sous ombilicale avec résection large en monobloc de la masse puis pariétoplastie. L´examen anatomopathologique confirmait le diagnostic. Les suites opératoires ont été simples. L´endometriose pariétale représente seulement 0,03 à 2% des endométrioses extra-génitales. Au niveau de la paroi abdominale, se situe dans le muscle grand droit et l´ombilic sur les cicatrices d´une césarienne, d´une hystérectomie. Cliniquement : la lésion est décrite comme une masse apparaissant en regard d´une cicatrice qui augmente de volume et devient douloureuse de façon cyclique, en concomitance avec les règles. Le caractère cyclique cataméniale de la douleur est un élément important d´orientation mais il est loin d´être indispensable pour évoquer le diagnostic. L´imagerie par résonance magnétique est l´examen spécifique en raison de sa résolution à fort contraste. Le seul traitement curable est l´excision chirurgicale, avec reconstruction pariétale qui nécessite parfois la mise en place d´une prothèse pariétale Les traitements médicaux ont montré leur limite, exposant à de fréquentes récidives et effets secondaires. La localisation extra génitale de l'endométriose est rare, mais elle est plus sévère et peut avoir une évolution locale maligne, bien que ses structures restent bénignes.
Abdominal wall endometriosis is a rare extragenital endometriosis which can mimic malignant tumors. We here report a case of post-cesarean scar endometriosis treated in our hospital. The purpose of our study was to highlight the diagnostic and therapeutic processes. L.M aged 32 years, G2P2 with no previous history, presented with cyclic paroxysmal hypogastric pain characterized by premenstrual recrudescence without any associated sign. Clinical examination showed hard mass in the fannenstiel incision. The remainder of the examination was normal. Ultrasound showed intramuscular lesion and MRI objectified enhancement synchronous with the uterine lining (endometrium), measuring 53.5x38x66mm. Treatment was based on parietectomy through supraumbilical incision. The mass was removed in one piece by wide excision. Then paritoplasty was performed. Anatomopathological examination confirmed the diagnosis. The postoperative course was uneventful. Parietal endometriosis accounts for only 0.03- 2% of abdominal wall and extra-genital endometriosis. It occurs in the rectus abdominis muscle and umbilicus in caesarean section and hysterectomy scars. Clinically, the lesion is described as a mass in a scar that increases in volume and becomes cyclically painful during menstruation. The catamenial and cyclic character of pain is important but not essential to establish the diagnosis. Magnetic resonance imaging is the examination of choice because of its high contrast resolution. Surgical excision with wall reconstruction, sometimes requiring wall prosthesis, is the only treatment option. Medical treatments have indeed shown their limit, exposing patients to frequent recurrences and side effects. Extragenital endometriosis is rare, but it is more severe than common endometriosis and may have local malignant progression, although its structures remain benign.
Key words: Endometriosis, tumor, abdominal wall
L´endométriose a été décrite pour la première fois par Karl Von Rokitansky en 1860. Il s´agit d´un trouble gynécologique chronique dans lequel survient l´implantation de tissu de l´endomètre fonctionnel en dehors de la cavité utérine. Cela concerne principalement les femmes en âge de procréer. Les principaux sites pour l´endométriose extra-pelvienne comprennent les poumons, la plèvre, les reins, la vessie, les intestins, les ganglions lymphatiques et la paroi abdominale. Endométriose de la paroi abdominale est une localisation rare, qui représente seulement 0,03 à 2% des endométrioses extra-génitales, la grande variabilité des symptômes et des présentations cliniques ainsi que les connaissances limitées sur la maladie peuvent conduire à difficultés de diagnostic et les retards préjudiciables au bien-être du patient et sa qualité de vie. Nous rapportons le cas d´une endométriose cicatricielle post césarienne prise en charge dans notre formation. Afin de mettre en évidence les étapes de diagnostic et thérapeutique.
Mme L.M. âgée de 32 ans, a été hospitalisée pour prise en charge chirurgicale d´une tuméfaction hypogastrique. Elle est mère de 2 enfants vivants et porteuse d´un utérus doublement cicatriciel, la dernière césarienne date de 5 ans. Le reste des antécédents médicaux ou chirurgicaux étaient sans particularité. Le début de la symptomatologie remonte à 9 mois par l´apparition de douleur hypogastrique cyclique paroxystique à recrudescence prémenstruelle, sans métrorragie, sans trouble urinaire, ni digestif. L´examen clinique a trouvé une masse hypogastrique dure, en regard de l´incision de Pfannenstiel, de 6 sur 4cm, fixe par rapport aux plans superficiel et profond. L´examen gynécologique et les touchers pelviens n´ont pas révélés d´anomalies. Le reste de l´examen somatique était sans particularité. L´échographie a montré un processus lésionnel intramusculaire, d´échostructure hypoéchogène hétérogène, grossièrement ovalaire, de contours circonscrits, avasculaire au Doppler mesurant 65x36x40mm. L´imagerie par résonance magnétique (IRM) objective une formation tissulaire au dépend du muscle grand droit de l´abdomen latéralisée à droite, à limites irrégulières de signal hétérogène, en iso signal T1, hypersignal T2, renfermant des zones hémorragiques en hypersignal T1 FS, rehaussée de façon synchrone par rapport à l´endomètre utérin, mesurant 53,5x38x66 (Figure 1, Figure 2). A ce stade le diagnostic d´endométriose pariétale parait évident tout en gardant à l´esprit la possibilité d´une tumeur desmoïde, ainsi la décision était de reséquer la masse vu sa taille ainsi que son retentissement fonctionnelle. L´ancienne incision Pfannenstiel est reprise, l´exploration intra-abdominale ne montre aucune lésion d´endométriose pelvienne. Une exérèse chirurgicale large a été pratiquée avec pariétectomie sous ombilicale et résection large en monobloc de la masse avec sacrifice aponévrotique antérieur et sacrifice musculaire au niveau du tiers interne des grands droits par crainte de tumeur desmoïde (Figure 3). Devant l'importance de la perte de substance pariétale une plastie de la paroi a été réalisée grâce à une plaque biface de 30x30cm (Figure 4). Et l´examen anatomopathologique confirmait le diagnostic d´endométriose pariétale. Les suites opératoires ont été simples et huit mois après le diagnostic, il n´existe aucun signe de récidive locale ou d´endométriose pelvienne.
L´endométriose se définit comme l´implantation de tissu de l´endomètre fonctionnel en dehors de la cavité utérine. L´endométriose de la paroi abdominale est une affection rare, qui représente seulement 0,03 à 2% des endométrioses extra-génitales. Elle est associée à une endométriose pelvienne dans 26% des cas [1]. Elle touche 15% des femmes en période d´activité génitale entre 20 et 40 ans et 5% des cas sont découverts chez les femmes ménopausées. Les localisations habituelles de l´endométriose sont ovariennes, péritonéales, dans la cloison séparant la vessie, l´utérus et le vagin ou le rectum. Dans de rares cas, elle se développe dans le tube digestif, l´appareil urinaire, la plèvre, les poumons, le foie, le pancréas, la vésicule biliaire et exceptionnellement dans la peau ou la paroi abdominale. Au niveau de la paroi abdominale, elle se situe dans le muscle grand droit de l´abdomen et l´ombilic sur les cicatrices d´une césarienne, d´une hystérectomie ou sur le site de passage d´aiguille d´amniocentèse et des trocarts de cœlioscopie.
Cliniquement: la lésion est décrite comme une masse apparaissant en regard d´une cicatrice qui augmente de volume et devient douloureuse de façon cyclique, en concomitance avec les règles. Le caractère cyclique cataméniale de la douleur est un élément important d´orientation mais il est loin d´être indispensable pour évoquer le diagnostic. Enfin, lorsque la lésion est très superficielle, il est possible d´observer de façon cyclique un changement de teinte de la lésion qui devient bleuâtre et peut même se fistuliser à la peau sous forme d´un écoulement sanglant. La palpation de la lésion doit permettre d´en apprécier la taille et la localisation en profondeur, la lésion envahit fréquemment les muscles abdominaux et leur gaine.
Les diagnostics différentiels: sont nombreux : éventration, hématome, granulome, abcès, adénopathie, lipome, neurofibrome, sarcome et tumeur desmoïde.
L´échographie: c´est la technique de première intention pour l´évaluation d´une endométriose pelvienne mais présente des limites liées au champ d´analyse et à l´expérience de l´opérateur. L´échographie oriente le diagnostic d´endométriose pariétale sans spécificité. Elle montre une masse tissulaire, bien limitée, hypoéchogène avec une vascularisation externe ou interne à l´examen Doppler ou une formation kystique hétérogène.
L´aspect tomodensitométrique: des localisations sous cutanées de l´endométriose n´est en aucun cas caractéristique : il s´agit d´une masse tissulaire homogène ne prenant que peu le contraste après injection en raison du caractère faiblement vascularisé des lésions [2]. Cet aspect est identique à celui des localisations intra-abdominales ou pelviennes.
L´imagerie par résonance magnétique: est l´examen spécifique en raison de sa résolution à fort contraste [3]. Les séquences SE pondérées en T1 et T2 sans et avec suppression de la graisse dans les trois plans sont habituellement réalisées. L´injection du gadolinium n´est pas de routine. L´implant endométriosique a un signal variable iso-ou hypo-intense en séquenceT1 et hétérogène en séquence SE T2 avec soustraction de la graisse. Ceci est attribué à l´âge du saignement intra-tumoral, à la quantité de fibrose et à la réaction inflammatoire du tissu musculaire dans lequel il se développe. Le stroma fibreux dans la masse endométriosique est hypo- intense en pondération T1 et T2. Les saignements récents sont hyper-intenses en T1 et en T2 et les dépôts d´hémosidérine secondaires à des saignements anciens sont responsables de l´hypersignal sur les 2 séquences. La ponction par aspiration ou la biopsie percutanée sont formellement contre indiquées s'il y'a la moindre suspicion clinique ou échographique d'endométriome pariétal [4], car il y a un fort risque de dissémination le long du trajet de la biopsie et l'exérèse chirurgicale totale est le seul traitement valable d´un endométriome de paroi.
L´examen histologique confirme le diagnostic et exclut une néoplasie maligne, primitive ou secondaire ou une autre lésion bénigne. Elle objective la présence d´un épithélium de surface de l´endomètre avec une prolifération réactive des vaisseaux du stroma dans le tissu musculaire. Ces implants endométroïdes hypervascularisés développent une fibrose autour de l´hémosidérine déposée par saignements cycliques et forment une masse solide dans le muscle [5]. Les techniques immunohistochimiques de dosage des récepteurs stéroïdiens, utilisant des anticorps monoclonaux spécifiques, trouvent des récepteurs à l´œstradiol et à la progestérone tant au niveau glandulaire qu´au niveau du stroma, mais la répartition est très hétérogène [6]. La cancérisation des lésions d´endométriose se rencontre principalement au niveau de l´ovaire [7]. Les localisations extra pelviennes des lésions d´endométriose ayant dégénéré ne représentent qu´environ 20% des cancers attribuables à l´endométriose [8]. Pour affirmer la cancérisation d´une lésion d´endométriose plusieurs critères doivent être présents. Ils ont été définis il y a maintenant plusieurs décennies par Sampson puis Scott [7] à savoir : la coexistence de l´endométriose bénigne et du tissu endométrial malin dans le même organe, l´absence de tumeur primaire ou secondaire d´une autre origine dans l´organe, une histologie tumorale compatible avec de l´endométriose, l´existence d´une zone de transition entre le tissu endométriosique et le tissu malin.
Les traitements médicaux: (par antigonadotropes, analogues de la LH-RH) des localisations pariétales ont montré leur limite, exposant les patients à de fréquentes récidives, aux effets secondaires de l´hormono-suppression ou aux effets androgéniques [9]. Le traitement médical peut se concevoir comme traitement d´induction pour des masses volumineuses, visant à réduire le volume de l´endométriome et le défect pariétal résultant de son exérèse. La réaction scléreuse qui délimite le foyer d´endométriose, sa mauvaise vascularisation ainsi que l´importance de la masse tumorale par rapport à la faible quantité de récepteurs hormonaux expliquent l´absence d´effet bénéfique d´un traitement préopératoire. De plus l´exceptionnel carcinome endométrioïde, rapporté pour des localisations extra génitales [10], constitue un argument supplémentaire en faveur de l´exérèse chirurgicale
Le traitement de ces lésions est l´exérèse chirurgicale totale: l´exérèse doit être large, emportant la totalité de la lésion et passant au minimum à 5 mm en zone saine [2]. La reconstruction pariétale après exérèse nécessite parfois la mise en place d´une prothèse pariétale lorsque la fermeture des berges musculo-aponévrotiques est impossible tel le cas de noter patiente. L´hystérotomie est le primum movens de bon nombre de ces lésions. Le traitement préventif des endométriomes pariétaux est donc la qualité des fermetures chirurgicales de l´utérus lors des césariennes et d´un lavage sous pression des berges de cicatrices opératoires avant fermeture par une solution saline.
La localisation extra génitale de l'endométriose est rare, mais elle est plus sévère et peut avoir une évolution locale maligne, bien que ses structures restent bénignes. La localisation pariétale est souvent iatrogène, survenant après des interventions chirurgicales chez ces patientes. Le seul traitement curable de cette topographie de l'endométriose est l´excision chirurgicale, d´où l´intérêt de la prévention par protection pariétale lors des césariennes.
Les auteurs ne déclarent aucun conflit d´intérêts.
Tous les auteurs ont participé à ce travail et ont lu et approuvé la version finale.
Figure 1: coupe IRM abdominale pondérée en séquence T1 montrant une formation tissulaire au dépend du muscle grand droit de l´abdomen latéralisée à droite, à limites irrégulières de signal hétérogène, en iso signal T1
Figure 2: coupe IRM abdominale pondérée en séquence T2 montrant une formation tissulaire au dépend du muscle grand droit de l´abdomen latéralisée à droite, à limites irrégulières de signal hétérogène, en hyper signal T2
Figure 3: aspect de la pièce de résection emportant la masse avec des marges de résection musculaire
Figure 4: image opératoire de la cure prothétique
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